MoscouTerre: Wild n'Slow - la mode éthique de Joanna Martinez

WILD n'SLOW

https://www.wildnslow.com/

A l'occasion du lancement de son site internet en français et en anglais, l'équipe de MoscouTerre vous propose sa 1ère interview, celle de Joanna Martinez, la créatrice de la marque Wild n'Slow, d'origine polonaise, mariée à un français vivant actuellement à Moscou.

Des matières nobles qui ne font pas de mal à la planète pour une mode éthique et responsable.

Pas de collection, elle préfère prendre le temps de concevoir des vêtements qui durent,

voilà sa philosophie !

Comment est né Wild n'Slow ?

L'aventure Wild n'Slow a commencé en Guadeloupe où nous avons passé 3 ans. Au début je me suis sentie étrangère dans ce paradis. Éloignée de la famille, des amis, de la civilisation européenne et de la vie métropolitaine. Je pestais contre les moustiques, les cafards, l'internet bas débit ou les magasins mal approvisionnés. Les boutiques avec les tenues arc-en-ciel, 100% polyester ne me correspondaient pas. J'ai donc commencé à confectionner des petites robes en coton pour moi, ensuite pour mes copines. Au fur et à mesure j'apprivoisais l'île, sa nature omniprésente et l'idée de créer une marque de vêtements grandissait en moi. J'ai franchi le pas, j'ai crée Wild n'Slow pour habiller les femmes amoureuses de liberté, ouvertes à de nouvelles expériences, en contact avec la nature.

Où sont fabriqués les vêtements Wild n'Slow ?

Aujourd'hui les vêtements Wild n'Slow sont tous fabriqués en Pologne dans un petit atelier de couture à Ostroda dans la région des lacs. Trouver une bonne usine quand on propose des vêtements c'est le nerf de la guerre. D'abord on veut des vêtements qui durent longtemps et la qualité de la confection y joue beaucoup. Je suis vigilante sur l'impact social de la fabrication. Je m'interdis de travailler avec des pays dont la législation du travail n'est pas assez protectrice. Vous imaginez bien que ces convictions ne nous font pas gagner du temps. Madame Halina, la directrice est impliquée personnellement dans la réussite de nos productions. Nous avons des relations privilégiées avec cet atelier et c'est très précieux.

En moyenne combien de temps met une couturière pour fabriquer une robe ?

La confection d'une robe peut aller très vite. Ce qui prend le plus de temps c'est toute la préparation et le travail de recherche sur le modèle et le prototype. Aucun de nos projets n'est laissé au hasard surtout lorsqu'il s'agit du lin. Pour rendre le lin attractif et faire tomber le mythe du vêtement difficile à porter, nous faisons beaucoup d'essais. Avant de sortir un modèle qui soit beau, moderne, intemporel, que nos clientes veulent porter et garder longtemps dans leurs placards, nous allons réaliser des prototypes. Il y en a qui ne nous donnent pas satisfaction alors nous recommençons jusqu'au moment où la coupe est parfaite, le tombé fluide et le tout met la silhouette en valeur. Une fois cette phase de conception finie nous passons à la phase de confection. Le lin que nous utilisons est déjà assoupli. Il est découpé, cousu et ensuite envoyé au prélavage pour éviter qu'il ne rétrécisse au lavage. Lors de la confection on ajoute des coutures de renfort par exemple au niveau des fentes latérales, des poches, on renforce les pattes de boutonnage ... Bref nous mettons la barre haute pour maintenir des standards élevés mais c'est tellement intéressant et c'est le principe du slow fashion.

Pourquoi le choix du lin ?

Pour la première collection j'ai choisi le coton, une matière naturelle mais je me suis rendue compte que la culture du coton est extrêmement gourmande en eau et en pesticides. Elle est à l'origine d'une des catastrophes écologiques comme l'assèchement de la mer d'Aral. Plus je devenais consciente du désastre écologique qu'occasionne l'industrie de la mode, plus j'étais attentive aux matières premières utilisées, par exemple en évitant les fibres synthétiques, premières responsables de la plastification des océans. A mon sens la matière la plus écologique qui soit est le lin.

C'est une matière première cultivée et produite en Europe, bio sourcée, qui n'aime pas les pesticides et les précipitations naturelles lui suffisent. Très résistant, le lin dure longtemps sans se déformer, sans pelucher. C'est le seul tissu qui est de plus en plus beau et souple au fil des lavages. C'est une matière avec des propriétés thermorégulatrices, vous y serez bien plus au chaud qu'en mettant des vêtements en polyester ou acrylique. Un tissu en lin peut absorber 20% d'humidité sans paraître humide et possède des vertus anti-allergiques. Actuellement j'ai deux fournisseurs de lin : un fournisseur polonais Biotextil qui rachète du lin brut aux producteurs polonais et européens, souvent français et il fait ensuite la teinture lui-même selon la certification OEKO-TEX. Le second est un producteur biélorusse Orsha Linen Mill, aussi certifié OEKO-TEX. Cette certification signifie que pour la teinture il n'a pas eu recours aux produits toxiques. Et puis j'ai choisi le lin parce que j'aime son odeur, sa noblesse, son élégance, son histoire ... c'est une matière éternelle !

Peux tu nous en dire plus sur ta dernière robe Zero Waste ?

Dans l'industrie textile, chaque année 60 milliards de mètres carrés de tissus sont jetés lors de la découpe des vêtements sans parler des déchets post-consommation (des vêtements que l'on jette une fois qu'on en veut plus). La plupart de ces déchets sont jetés dans la nature sans pouvoir être triés ou recyclés et finissent en Asie, loin d'ici. Des chutes de polyester se dégradent pendant 200 ans voire plus ! En faisant des recherches je suis tombée sur Mylène l'Orgueilleux, modéliste française qui est spécialisée dans la construction de vêtements zéro déchet. Sa démarche m'a réellement fasciné car elle a identifié un problème écologique de taille lié à l'industrie de la mode bien que méconnu et elle donnait une solution concrète. Mylène fait des recherches sur la construction Zero Waste et propose des patrons en "open source". Je l'ai contacté et j'ai eu son accord pour réinterpréter un de ces modèles en lin à condition de le sortir en édition limitée de 30 pièces. Pour aboutir à ce qu'est aujourd'hui la robe Adonis, Mylène a mis 6 semaines de travail et de recherches intensives. Le résultat est sublime et je suis très fière de cette collaboration. Pour moi c'est une sorte de manifeste pour propager l'idée de la mode plus calme et plus consciente. Porter la robe Adonis c'est comme enfiler une cape de super héroïne : elle démultiplie les super compliments et permet de sauver la planète des déchets. A adopter d'urgence !